Concours LME – FleurDeMenthe

14 mai 2012 18 h 31 min

Elle se réveilla, étourdie de son rêve. Mais ce n’était pas un rêve.

Que faisait-elle là ? Cet endroit qu’elle avait toujours retrouvé dans ses rêves les plus bouleversants se trouvait là, tout autour d’elle. La rue pavée sur laquelle elle marchait, était bordée d’une petite barrière noire, derrière laquelle émergeait une petite colline verdoyante, et quelques bouleaux plantés à son sommet. Elle passa le portillon, y monta, et retrouva une scène connue. Lorsqu’elle se baladait dans les sentiers de son esprit endormi, elle se retrouvait souvent ici, près de ces arbres blancs, frêles et délicats. Une bande de jeunes occupaient les quelques bancs en bois, des artistes dessinaient sur leurs chevalets, des enfants couraient autour des arbres. Une sensation de paix envahit son cœur. C’était la même qu’elle ressentait quand dans son sommeil, elle s’éveillait ici. Tout était exactement identique à ce qu’elle pensait n’être qu’un fruit de son imagination débordante.
Elle errait telle une âme égarée, avec douceur et légèreté. Elle n’attirait pas l’attention, personne ne la voyait, personne ne la remarquait. Comme si elle avait toujours appartenu à cet endroit, à ce paysage, à cette terre.

20h carillonna au clocher de l’église. Le soleil illumina soudain l’endroit de sa lumière orangée lui offrant une atmosphère emplie d’émotion. Une émotion qu’elle ne connaissait que trop bien. Comme elle le faisait dans ses rêves à chaque fois que l’air se parait de ce voile rougeoyant, elle se retourna.
Et ce qu’elle vit la paralysa : elle était là. Elle qui hantait ses nuits, elle qui nouait ses tripes à chaque réveil, elle était là, face à elle, et la fixait du regard.

Rêvait-elle ? Elle se mordit l’intérieur de la bouche et sentit le sang affluer vers le pinçon. Elle était toujours là, dans cette lumière, avec cette autre face à elle.
Ce rêve s’il en était un, prenait une tournure particulière, inconnue, effrayante. Comment déterminer le réel de l’imaginaire ?
Elle tenta de se souvenir comment elle était arrivée ici, et elle se souvint. Un jour, elle avait reçu une lettre avec un itinéraire et une carte, qu’elle avait jetée, croyant à une nouvelle forme de publicité. Le lendemain, elle avait reçu une seconde lettre, manuscrite celle-ci, lui expliquant à nouveau l’itinéraire avec une date et une heure : Lundi 14 Mai, 20h. Dans trois jours. Perplexe, elle l’avait conservé sans savoir quelle suite y donner.
Le surlendemain, elle avait reçu une carte encore plus détaillée que la première, précisant une adresse. Elle était accompagnée d’une chaîne.
C’est là que tout s’était accéléré.
Cette chaîne, elle la connaissait, elle était la réplique exacte de celle qu’elle avait depuis toujours, et qu’elle portait au cou depuis l’âge de douze ans. A un détail près, la sienne portait une plaque avec son prénom, Sophie. Celle de l’enveloppe portait celui de Sophia. Une lettre qui dans toute son innocence ne restait pas moins envoûtante. Une voyelle qui avait laissé Sophie sans voix, la privant d’oxygène quelques poignées de secondes. En retournant la plaque, elle y avait retrouvé le même message qui ornait la sienne. Un message qu’elle seule connaissait : « Reste toujours fidèle à ton âme ».
Ni le cachet de la poste, ni l’espace expéditeur, chacun resté vierge ne pouvait lui donner le moindre indice. Si elle voulait savoir, si elle voulait chasser ces angoisses qui naissaient en elle, elle devait suivre cet itinéraire, et se rendre à cet endroit précis sur cette carte, et elle devait s’y rendre pour le 14 Mai, 20h. Dans deux jours.

Quelques heures plus tard, elle avait pris sa voiture, s’était perdue plusieurs fois, mais n’avait jamais renoncé à arriver au lieu de rendez-vous à temps. Tout ceci ne pouvait pas être une coïncidence. Elle avançait dans un brouillard ambiant, son esprit se fatiguant vite à trouver une explication logique à ces indices. Les kilomètres défilaient, la pluie succédait au soleil, la nuit au jour, mais elle avançait toujours, déterminée.
Malgré les maux de tête qui se faisaient de plus en plus fréquents le long du trajet, elle restait concentrée sur cette date, et cette heure. Et elle avait réussi, sans savoir que c’est ici qu’elle arriverait, dans cette ville qu’elle connaissait bien dans ses échappées nocturnes.

20h carillonna au clocher de l’église, et le soleil illumina soudain la ville de sa lumière orangée la caressant d’une douce atmosphère. Sophie se retourna, et se retrouva face à elle. Les rayons du soleil couchant auréolaient son visage, faisaient flamboyer sa chevelure rousse. Dans ses rêves, elle avançait la main vers cette autre, et l’image se brisait comme un miroir. Parfois, l’autre se révélait n’être qu’un nuage de fumée, s’évaporant dans les airs dès qu’elle s’en approchait trop près. Ne pouvant déterminer si son esprit lui jouait un mauvais tour, ou si tout ceci était bien réel, elle tenta d’avancer la main vers ce visage, identique au sien. Elle tremblait, redoutait de se réveiller d’un moment à l’autre. Mais sa main se posa sur cette peau illuminée de taches de rousseur. Cette autre passa la main sur la sienne, et c’est ainsi qu’elles restèrent de longues minutes, se faisant face, l’une et l’autre, se regardant comme on découvre un trésor.
Dans leurs rêves les plus fous, elles s’étaient cherchées. La ville de leur enfance, où elles avaient passé leur première année ensemble, s’était ancrée dans leur esprit. Et voilà, que l’une et l’autre avait suivi les lettres reçues, les cartes tracées. Elles avaient écouté leur intuition, quand, au contact de la chaîne, leur cœur s’était embrasé.

Derrière son chevalet, une bonne fée observait la scène. Une bonne fée, peut-être pas. Elle en portait, du moins, le costume avec son ensemble mauve, ses cheveux blancs, et ses petites lunettes rondes. Elle n’était, en vérité, qu’une femme soucieuse des conséquences de son action dans laquelle elle fondait beaucoup d’espoirs.

Sophie et Sophia, deux jumelles qu’elle avait réussi à enfin rassembler. Un drame les avait séparées alors qu’elles avaient à peine un an. Les aléas des foyers les avaient conduites à ne jamais se revoir depuis. Violaine s’était battue pour les garder réunies, mais en vain. Elle s’était alors positionnée en gardienne invisible de leur vie. Elle avait attendu leur prise d’indépendance, leur atteinte de la maturité pour enfin les rappeler l’une à l’autre.
20 ans après leur séparation, voilà qu’elles se redécouvraient l’une et l’autre. Leur visage se noyait de larmes et d’une incompréhension toute relative. Comme si, au fond d’elles-mêmes, elles avaient toujours su que l’autre existait…

J’avais envie de participer avec vous à ce challenge… sans entrer dans la course…

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